Avec Claire Fontana on entreprend un voyage fascinant dans l’intimité du ressenti.
Guidés par la touche habile de la dessinatrice,les contours délicats et estompés, nous conduisent en douceur dans une sphère où les états d’âme sont seulement esquissés et où l’interprétation active du spectateur construit l’émotion ainsi subtilement évoquée.
Dans le dessin transparait la formation académique de l’artiste, où les atmosphères rappellent une façon profondément liée à la leçon de la Renaissance et à la reprise de canons formels de la représentation. Les nus et les portraits témoignent de la connaissance approfondie des proportions humaines et chaque œuvre contient en soi une lointaine allusion à une façon classique et dense d’un humanisme triomphal. Il ne manque pas cependant de rappels de forte modernité : la leçon des maîtres du nord et de Hammershoï dans l’épure de lignes essentielles, dans le clair-obscur des espaces, dans les tons monochromes.
Le parcours de Claire Fontana exhale ainsi des atmosphères nord européennes auxquelles se superposent l’expérience de l’art italien, se plaçant entre tradition et innovation, passé antique et histoire récente.
Dans le dessin comme dans les sculptures l’expression des états d’âmes s’aventure dans des sphères plus intérieures et spirituelles, qui renvoient plus à l’Hellénisme qu’à l’antiquité proprement dite. La pureté des tons, caractéristique du classicisme renaissant, semble masquer volontairement une imposition de motifs romantiques autant émotionnels que psychologiques, comme si tout tournait autour du rapport entre l’expression des émotions et leur saisie, leur camouflage, leur énigme toujours en suspens.
Les poses sont très classiques, mais l’atmosphère renvoie à une tension interne, seulement évoquée et à peine perceptible dans les visages laissés volontairement incomplets, dans les portraits aux traits granitiques.
Les sculptures de matériaux variés, souvent combinés entre eux, accordent une importance conceptuelle à la matière même des socles, l’ensemble devenant une seule unité de sens.
Un instantané cinématographique semble fixer les figures fines tendues par une vive force de mouvement, sauts éphémères immortalisés dans leur plus intense tension. L’on trouve ainsi des plongeurs prêts à se lancer dans des «fragments de mer», dans des morceaux d’eaux inconnues, profondes et enveloppantes,un peu menaçantes ; des surfeurs chevauchants des vagues gigantesques ; des personnages accrochés à des falaises escarpées.
En général transparaît l’exigence d’un profond recueillement, un besoin de paix, une évanescence continuellement reproposée à travers des figures qui se concèdent seulement par bribes, sur le seuil de l’invisible, mais déterminantes et persistantes, toujours pourchassées et jamais vraiment saisies.
Texte d’Elena Capone